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Saint-Leu d'Esserent
Si l'escarpement n'est pas confirmé par une muraille et la courtine bien défendue par une troupe d'hommes en armes, la sécurité offerte par les hauteurs est très illusoire mais la peur ne se raisonne guère, pas plus que les choix faits pour l'exorciser. Ainsi, la majorité des petites implantations ouvertes qui semblent se maintenir au Bas-Empire, sont situées au pied d'une hauteur jugée sécurisante. Le gros du village s'installe en agglomération ouverte tandis que le réduit haut, sommairement aménagé, offre un ultime recours. Sur cet espace, mal approvisionné en eau, les activités praticables sont limitées et l'occupation ne représente que 10 à 15% de la population. Si le calme subsiste quelques décennies, les plus inquiets finiront par rejoindre l'agglomération basse, là où l'on profite des richesses drainées par la voie sur berge.
Une communauté d'agriculteurs pratiquant l'exploitation céréalière exclusivement peut fort bien s'accommoder du promontoire et du plateau attenant mais, en période troublée, les exploitations spécifiques ont pratiquement disparu et le petit nombre de bêtes à cornes que chacun possède porte immanquablement l'exploitant vers les points d'eau et les berges accessibles.
Négligé, faiblement occupé, le réduit est alors exposé aux implantations politico-religieuse. Un prétendu protecteur et ses hommes d'armes, un prêcheur inspiré et sa cohorte de fidèles seront tentés par ce site négligé. Le petit promontoire crayeux qui domine l'Oise à la hauteur de Saint-Leu sera choisi par les religieux et celui de Montataire, à quelques kilomètres en amont, fixera, lui, des protecteurs en armes.
Les communautés inspirées sont fort nombreuses depuis le Bas-Empire. Vouées à la charité publique et parfois portées à la rapine, elles ne sont pas toujours bien vues. La légende dorée a tressé à certains de ses hommes des couronnes qu'ils ne méritaient pas. C'est la règle bénédictine qui leur imposera rigueur et travail. Grâce à elle ils peuvent subvenir à leurs besoins et s'intégrer sans difficulté à la communauté rurale environnante. Dès lors, leur condition est honorable et leur message crédible. Le septième siècle est propice à la refonte des petites communautés et c'est à cette époque que le bourg d'Esserent va rencontrer son saint Patron, Saint-Leu ou Saint-Loup évêque de Sens. Il a du quitter sa ville après des démêlés avec le roi Clotaire II. Accompagné d'une petite troupe de fidèles, il parcourt l'Ile de France et marque les communautés ou les agglomérations qui vont l'accueillir. Saint-Loup de Naud, Saint-Leu la Forêt et l'ont reçu et garderont son souvenir.
A cette haute époque, les lieux de culte développés par une petite communauté religieuse sont souvent au nombre de trois: l'église des novices et catéchumènes, celle destinée aux paroissiens et enfin une petite chapelle liée à l'enclos funéraire. L'église réservée à l'accueil des convertis est toujours la plus grande et fixe généralement l'emplacement des édifices ultérieurs. Des travaux d'aménagement réalisés à ont mis à jour un pavement qui peut remonter au VII° et c'est peut être celui qu'a foulé l'évêque de Sens. D'une manière très générale, la première abbatiale unique et de grande taille correspond à l'époque carolingienne. L'axe oblique conservé par le narthex fut probablement celui de cet édifice basilical.
L'abbatiale actuelle
Ce sont les aménagements du XIII° qui ont donné à cette homogénéité et cette pureté qui plaisaient tant à Renan. En fait, il s'agit d'un édifice fort complexe issu de quatre campagnes imbriquées, menées sur une période relativement longue 1140/1240.
Le narthex actuel, fortement gauchi par rapport à l'ensemble, a préservé les accrochages d'une nef du XI° dont l'entraxe est de 6,25m. Les élévations de 3 pieds nominaux donnent des archivoltes de 0,80m d'épaisseur. La structure était relativement puissante mais non susceptible d'être voûtée. L'ensemble des trois vaisseaux représentait 12 à 13m de largeur interne sur une longueur de 30m environ si l'on en juge par les contraintes qui vont peser sur le chantier à venir.
Au XII°, vers 1130/1150, les travaux reprennent avec l'édification d'un puissant narthex à deux niveaux qui vient clôturer la nef du XI°. C'est la partie la plus ancienne subsistante mais l'intérieur fut profondément remanié, fin XII°, début XIII° et les énergiques restaurations modernes nous empêchent d'identifier les raccords d'appareillage. La structure à deux niveaux peut suggérer qu'il venait clôturer une nef à tribunes mais, là encore, rien n'est assuré. Les deux travées externes seront surmontées de tours à deux niveaux d'arcatures et flèches de pierre. Les caractères de l'ensemble sont encore très roman.
Vers 1160, les travaux reprennent à l'est, en terrain vierge, à 10/12m en avant de l'abside du XI°, mais nous sommes à proximité de l'abrupt toujours mal stabilisé et le constructeur préfère mettre le futur chevet en attente. Sa première campagne portera sur une puissante travée flanquée de deux tours. L'axe choisi est sans rapport avec la nef du XI° et le narthex qui vient d'être achevé. Le maître d'œuvre envisage sans doute une reconstruction complète et son programme est sans rapport avec l'existant. L'entraxe est porté à 12,10m contre 6,25m et la hauteur sous voûte dépassera les 20m, la nef précédente ne faisait que 13 à 14m. Par contre, quelque chose doit gêner le programme au nord. Là les bases de la tour qui vont nécessairement commander la largeur des bas côtés à venir est moindre qu'au sud.
En attendant l'achèvement des travaux de soutènement menés côté abrupt, le maître semble indécis sur la nature du futur chevet mais il doit penser à une composition à la normande, comme à Senlis, et, dans ce cas, le déséquilibre des bas-côtés est sans importance. A cette époque la composition à la normande ou bénédictine avec abside simple à trois niveaux d'ouverture et des absidioles à deux niveaux, devait être couramment pratiquée en Ile de France. C'est le programme développé à la même époque par le constructeur d'un édifice primitivement fort semblable à Saint-Leu: l'église de Moret-sur-Loing.
Les travaux doivent avancer rapidement et, dès 1165, l'état du chantier permet d'entreprendre les fondations des travées suivantes. C'est une structure alternée dont les pas sont de 4,70m et 4,73m à l'axe. Le support mineur est constitué d'une colonne monolithique de 76cm de diamètre et le support majeur d'une pile cantonnée qui reprend sensiblement le caractère de la travée avec tour. Tout est prévu pour des voûtes sur croisées d'ogives.
Ces trois travées sont traitées en triple élévation. Au premier niveau, les bas-côtés voûtés sur croisées d'ogives ouvrent sur la nef par des arcs proches du tiers point et le bandeau qui couronne ce bas-côté se situe à 8,80m. Ensuite, nous trouvons un niveau médian, haut de 5m. Il est garni de belles baies géminées qui ouvrent sur de fausses tribunes accessibles mais non voûtées. Elles sont sans fenêtres extérieures et donnent directement sur le comble des bas-côtés. A Saint-Leu, cette disposition n'existe plus mais nous la retrouvons à Moret. Enfin, le troisième niveau est celui des fenêtres hautes. Les 12,10m à l'axe donnent des portées de 9,80m au doubleau majeur et 11m au doubleau mineur. Dans ces conditions et malgré la courbure des voutins perpendiculaires, les fenêtres hautes sont vastes pour l'époque: 4,40m de hauteur. Ces rapports ont engendré une composition à risque que les arcs-boutants du XII° viendront conforter.
Vers 1170, le nouveau programme est suffisamment avancé pour engager l'avenir. Les nouvelles structures sont au contact de l'ancienne nef. Le constructeur peut maintenant se consacrer au chevet.
Le chevet
Dans le chevet normand, les niveaux de l'hémicycle ne s'harmonisent pas avec ceux de la nef. C'était évident à Cerisy-la-Forêt trois quarts de siècle plus tôt, ce l'est toujours en ce milieu du XII°. Le parti exploité à Sens puis à Saint-Germain des Prés de Paris, où le sanctuaire reprend rigoureusement l'élévation de la nef, paraît beaucoup plus séduisant. La composition a fait ses premières armes à Sens avec un niveau médian très réduit. Ce dernier se développe quelque peu à Saint Germain des Prés mais c'est sans doute le premier traitement de Noyon qui va inspirer le constructeur de Saint-Leu. Son sanctuaire reprend strictement les élévations établies sur la nef et, avec 5m de hauteur, le niveau médian est amplement suffisant pour former des tribunes accessibles mais non voûtées. L'œuvre comprendra naturellement un déambulatoire et pourquoi pas des chapelles rayonnantes profondes avec deux fenêtres et piles centrales comme à Noyon. C'est l'une des deux orientations prise alors par les chevets à grand développement. Nous avons vu les constructeurs de Senlis et de Saint-Germer de Fly choisir une toute autre formule avec tribunes voûtées et chapelles peu profondes. Cependant, à , ce beau projet se heurte à une sérieuse difficulté: le déséquilibre des bas-côtés. Mais les constructeurs du XII° formés au sein des équipes à l'œuvre (sur le tas) ont toujours une grande maîtrise empirique et les gauchissements sont monnaie courante. Notre homme maintient donc son beau projet et sa démarche géométrique sera subtile.
L'hémicycle comporte cinq travées rayonnantes sur colonnes. Il est implanté comme il se doit sur l'axe de la nouvelle oeuvre, par contre, le mur périphérique du déambulatoire doit absorber le déséquilibre des bas-côtés et son point d'épure est distinct de celui du sanctuaire. L'écart est de 20cm environ. Le positionnement des chapelles se fera selon l'axe majeur, (celui de la nef et du sanctuaire) afin de préserver la régularité du plan rayonnant. Dans ces conditions, toutes les chapelles auront une ouverture différente et sans rapport avec la valeur angulaire des travées. Si nous prenons pour base une cercle facilement mesurable établi à la base de piles externes recevant les doubleaux, les valeurs des arcs sont les suivantes: chapelle axiale (privilégiée) 6,76m, première chapelle sud, 6,10m, deuxième chapelle sud, 5,80m, tandis que les valeurs des premières et secondes chapelles nord sont respectivement de 5,75m et 5n,65m. Les profondeurs sont également toutes différentes. Mesurées à l'arc de références elles s'échelonnent de 3,80m sur la chapelle axiale à 1,80m sur la chapelle externe nord. Cette dernière est si peu profonde que son système de voûtement fut lié à celui du déambulatoire. Nous pouvons penser que de ce côté l'obstacle qui avait imposé une moindre importance à la tour gênait toujours le développement du programme. De prime abord, rares sont les observateurs qui identifient tous ces menus travers. Il faut mesurer puis dessiner soigneusement l'œuvre en plan afin d'en restituer le tracé d'épure.
Après ce judicieux bricolage le constructeur peut réaliser l'élévation qu'il a projetée. Le sanctuaire est porté par des piles cylindriques de sections différentes; les unes au nombre de quatre font 77cm de diamètre, et deux autres font à peine 50cm, mais les restaurations successives nous privent de toute certitude quant à leur origine. Les cinq travées rayonnantes sont coiffées de voûtes sur croisées d'ogives et leur traitement marque une certaine évolution. Le constructeur refuse la contrainte du niveau de référence constitué par le plein cintre des ogives, les arcs prennent le pied nécessaire et sont alors plus ou moins brisés. Les voûtes des chapelles rayonnantes sont établies sur cinq nervures mais les voutins sont inégaux. A droite et à gauche de la pile centrale, l'ouverture est de 70° ce qui permet l'établissement de grandes fenêtres, tandis qu'aux ailes du système l'ouverture n'est plus que de 33°. Ces valeurs sont mesurées à la chapelle axiale. Les deux travées droites qui lient l'hémicycle aux tours sont traitées comme leurs voisines mais les irrégularités de reprise se trouvent dans les piles côté nef ce qui laisse supposer des murs externes déjà amorcés dans le cadre du projet avec absidiole.
Au niveau médian, le constructeur reprend les belles baies géminées de la travée alternée. Les niveaux déjà fixés sur le précédent programme sont respectés et tout porte à croire que le traitement initial représentait une fausse tribune, sans registre de fenêtres externes, donnant directement sur la charpente du comble. A ce niveau, la travée axiale reçoit une chapelle voûtée qui reprend à la fois le plan trapézoïdal et l'hémicycle. Nous voyons aujourd'hui un secteur d'arc en retrait des baies, c'est une reprise maladroite sans justification architectonique.
En partie haute, le sanctuaire reçoit une voûte sur croisées d'ogives à cinq travées rayonnantes dont l'effet est compensé par la demi voûte sixte partite établie sur la travée droite. C'est la composition classique qui s'impose en ce milieu du XII°.
L'ensemble oriental travée-tour, travée-alternée et chevet à grand développement doit être terminé vers 1185/1190. La nouvelle oeuvre est alors mise à disposition et la vieille nef livrée aux démolisseurs mais l'avenir du projet est mis en cause. Avec son étagement audacieux, et sans arcs-boutants hauts, la travée alternée donne des inquiétudes et c'est elle qui doit commander la suite du programme. D'autre part la charge est lourde pour une petite communauté et les moyens font sans doute défaut. Alors le responsable du projet doit réaliser, à contrecœur sans doute, une nef de transition de structure légère et couverte sur charpente.
La nef de transition
Il reste environ 31,50m de la travée alternée au narthex et cet espace libéré par la démolition de l'ancienne nef sera décomposé en six travées régulières de 5,30m en moyenne, les pas précédents étaient, nous l'avons dit, de 4,70m. C'est sur ces bases que le responsable de l'époque doit réaliser son programme léger. Nous pouvons l'imaginer d'un traitement particulièrement fruste: colonnes à tambours, archivoltes sans mouluration, murs médians sans ornement et registres de fenêtres hautes traités au plus simple,.bas-côtés et nef seront couverts sur charpente apparente. Cette nouvelle oeuvre jouxte le narthex selon un plan gauchi et les différences de longueur qui en résultent pour les élévations seront judicieusement réparties sur les cinq dernières travées.
Cette nef légère doit être réalisée avant 1200, 1180/1190 constitue une période probable. La nouvelle abbatiale de est maintenant exploitable. Ces oeuvres de liaison jugées provisoires étaient sans doute nombreuses à l'époque. Lorsque nous voyons aujourd'hui un édifice disparate, nous devons nous demander comment il a franchi les décades et parfois les siècles qui séparent les campagnes aujourd'hui reconnues.
Cette campagne rapidement menée a condamné une éventuelle structure perpendiculaire, un transept avec croisillons. La formule était-elle au programme initial? Nous l'ignorons mais c'est peu probable. Les constructeurs de Sens et de Senlis avaient réalisé des vaisseaux homogènes malgré des transepts anciens, quant au constructeur de Bourges il avait pratiquement absorbé l'ancienne structure perpendiculaire. Le parti du vaisseau unique avait donc de bonnes références et ce fut sans doute le choix des divers responsables du chantier de Saint-Leu.
Les aménagements du XIIIe
Nous avons dit que les parties orientales réalisées sur la seconde moitié du XII° étaient à risques. Dès la fin du siècle, des ruptures d'homogénéité ont engendré des mouvements inquiétants. Il faut avoir recours à des arcs-boutants extérieurs établis sur culées indépendantes et c'est la parade qui s'impose alors sur de nombreux édifices en difficulté. Ce sont les contreforts déjà mis en place qui serviront de base à ces culées. Volume du contrefort (parfois surchargé) plus mur donneront une profondeur de culée de 2,20m à 2,40m. Par contre, l'épaisseur disponible est variable. Elle n'est que de 60/70cm entre les chapelles et passe à 100 et 110cm sur les contreforts des travées alternées. Ces bases sont malgré tout jugées satisfaisantes et les aménagements peuvent commencer. Les culées sont portées à 15m et reçoivent un arc-boutant haut, une composition poids qui, sur un angle de 35° épaule la grande voûte à la hauteur du troisième quart. C'est le point d'application moyen choisi au début du XIII° pour conforter les voûtes du XII°. La parade annule ou limite la résultante externe mais ne protège pas contre le basculement du pied. C'est alors un moindre risque, le phénomène va s'accentuer au XIII° avec l'allègement des structures du niveau médian. A Saint-Leu, ce sont les structures sous combles qui doivent intervenir à cet endroit mais nous sommes perplexes car nous ignorons quels étaient les aménagements existants en ce début du XIII°. Le maître du XII° avait-il déjà réalisé les arcs-boutants sous combles que nous voyons aujourd'hui dégagés de la charpente? C'est probable. Pareil traitement se rencontrait déjà sur la nef de Durham et sur les travées droites nord du chevet de Cerisy-la-Forêt. Enfin, les aménagements conservés à Moret-sur-Loing peuvent être pris en confirmation mais, dans ce dernier édifice, toutes les parties hautes ont été reprises au XIII° et le voûtement d'origine nous est inconnu. Quoiqu'il en soit, à , la puissance des structures du niveau médian et le mode d'épaulement alors en fonction suffiront pour la partie orientale qui sera relativement stable à travers les siècles.
Satisfaits de leur ouvrage, les responsables du chantier envisagent de reprendre la nef provisoire. L'arc-boutant sur culée s'est révélé un excellent moyen. Le programme est donc lancé et le constructeur sans doute grisé par les résultats obtenus sur les parties du XII° va de nouveau prendre des risques.
La nef au XIIIe
La nouvelle élévation se veut conforme au parti du siècle mais cependant en harmonie avec l'ensemble oriental. L'élévation demeure à trois niveaux. Les piles qui s'inspirent des programmes de Chartres et de Reims comportent un noyau cylindrique flanqué de quatre colonnes engagées. Les archivoltes sobrement moulurées ne vont pas rompre l'harmonie du vaisseau. Les travées qui respectent le pas choisi dans la composition provisoire imposent une arcature médiane plus grande qui sera garnie de trois arcatures internes sur colonnettes monolithiques et la rupture de style n'apparaît guère.
Seul le bandeau qui domine le bas-côté change de niveau. En lieu et place de tribunes, le constructeur reprend l'aménagement réalisé sur les parties orientales. Nous trouvons là une étroite galerie de circulation fermée par un cloisonnement externe percé de petites fenêtres au-dessus d'un comble à pente réduite. Les fenêtres hautes avec meneaux et oculi sont de l'école de Chartres et de Soissons. Enfin, les grandes voûtes seront de plan barlong comme il se doit sur des travées régulières. Le projet est harmonieux mais c'est le traitement qui va manquer de rigueur.
Le constructeur pense pouvoir récupérer les murs extérieurs des bas-côtés où les contreforts de 100 X 90 lui semblent suffisants pour assurer la base des culées mais ce qui a parfaitement réussi à l'est, avec des structures médianes relativement puissantes, ne va pas suffire sur la nef où les maçonneries équivalentes sont beaucoup plus légères.
Cette récupération du mur ancien est attestée par les fenêtres nord qui sont aujourd'hui masquées par les nouvelles voûtes sur croisées d'ogives. Le chantier de la nef doit avancer très vite et les faiblesses se révèlent après coup. Au nord, il faut surcharger le mur ancien, au sud il faut le démonter et le reprendre complètement. De nouvelles culées plus puissantes (110 x 126) sont installées sur des fondations spécifiques et profondes. Les voûtes des bas-côtés sont également refaites. Ces mesures paraissent suffisantes. Les grandes voûtes sont achevées et maintenues avec un système d'arcs-boutants, haut et bas, qui reprend la formule imaginée sur les parties orientales. Sur les nouvelles culées sud, le glacis archaïque est remplacé par un chaperon et la disposition se généralise sur l'ensemble de l'édifice. Nous sommes alors vers 1230/1240 et l'abbatiale de est pratiquement achevée.