Le siècle des Plantagenets


SAINT-SURIN

Le site se trouve sur les terres alluviales d'un méandre de la Charente qui formait naguère une île, le comblement du canal l'isolant de la terre ferme doit remonter à la fin du Moyen Age. Le terrain est propice aux cultures maraîchères mais l'île offrait également un refuge facilement défendable mettant à l'abri de toute surprise.

Situé sur l'autre rive, au sud, et sur des terres dominant la rivière de 10 à 12m Châteauneuf sur Charente est desservi par un cheminement sur berge exploité depuis les temps préhistoriques, mais cette voie qui suit les méandres est peu pratique, d'où la présence à 3km au sud d'une voie antique aménagée dite Le Chemin Boisné. Ce contexte nous permet de proposer une occupation antique du site de Châteauneuf, probablement un gros vicus, et c'est sans doute au Bas Empire que l'île de Saint Surin acquiert ses caractères de refuge pour la population environnante.

Une fois le calme revenu les 50 à 80 foyers installés sur l'île vont s'organiser et l'absence d'ouvrage de franchissement leur permet d'acquérir une indépendance relative. Devenue paroisse après la Christianisation de la province, les 200 à 300 habitants vont construire une première église que l'on peut concevoir en bois, tourbe pour les murs et roseaux pour la couverture; c'est également le mode de réalisation des habitations. C'est dans ce sanctuaire primitif qu'intervient Saint Surin. S'agit-il d'un pasteur particulièrement véhément et décédé là en odeur de sainteté ou bien d'une sainte relique amenée dans l'église pour marquer l'indépendance de la communauté face au clergé de Chateaubriand ? Les deux hypothèses sont à retenir.

L'ouvrage actuel est constitué d'une cella dont la largeur est de 4m 90 et la longueur restante après reprise de 9m 40. Ses caractères sont archaïques et le grand appareil de récupération dominant dans les assises de l'ouvrage est aujourd'hui enterré par la montée du sol que l'on doit à la ruine des constructions environnantes. La porte sud en plein cintre, sans doute la plus ancienne, ne comporte aucune mouluration et se trouve partiellement obturée par la montée du sol. La porte occidentale date sans doute du XH°s.. Cette cella particulièrement archaïque peut être datée de la fin du X°s. par contre, les parties orientales qui se sont substituées à la petite cella sont, elles, incontestablement du XII°s.

Les travaux de reprise doivent commencer vers 1100/1120 et portent sur une belle abside en hémicycle sans aucune structuration, sauf deux petits contreforts externes. Achèvement probable vers 1130/1135.

Suit une travée coupole sans doute aménagée sur le volume de la cella occidentale. Ici, les arcs latéraux comme celui donnant sur l'abside sont en arc brisé par contre, celui ouvrant sur la nef a connu un affaissement dû sans doute au poids des maçonneries du clocher aujourd'hui transformé en pignon porte cloche dit clocher peigne. Sur cette travée au carré régulier nous trouvons une coupole de l'école d'Angoulême, faiblement intégrée, actuellement couverte d'un toit en bâtière. Période probable des travaux, 1145/1160.

Enfin, à une date indéterminée mais précoce, une tentative de voutement sera menée sur la cella occidentale et le grand appareil de parement doit dater de cette époque. Mais devant les risques encourus, venant sans doute du sol parcouru par une nappe phréatique, les travaux seront interrompus. Aujourd'hui isolée dans la verdure la petite église de Saint Surin est empreinte d'un charme particulier.


image1

(A)     Cella primitive du XI°s.
(B)     Reprise en parement du XII°s.
(C)     Porte archaïque X°s/XI°s.
(D)     Abside en hémicycle début XII°s.
(E)     Travée clocher milieu XII°s.
(F)     Arcs brisés milieu XII°s.
(G)     Arc de liaison avec la cella (affaissé)
(H)     Coupole sur pendentifs vers 1160/1170
(J)     Projet de clocher
(K)     Toiture en bâtière, aménagement
(L)     Clocher peigne, aménagement
(M)     Amorce de voûte sur la nef
(N)     Amorce de doubleau
(P)     Contreforts de sauvegarde


image2

Saint Surin. Vue d’ensemble.


image3

Saint Surin. Abside et travée orientale.


image4

Saint Surin. Vue d’ensemble latérale de la nef.